« Un remarquable ingénieur, un savant géologue, un incomparable meneur d’hommes, un grand commis d’une fidélité presque sans exemple, un praticien éminent et un théoricien littéralement unique de l’administration des affaires, Henri Fayol a été tout cela ». Le propos est élogieux, mais il émane d’un ouvrage, le Livre du Centenaire, publié par l’entreprise au sein de laquelle Henri Fayol a effectué l’intégralité de sa carrière. Qu’en disent des acteurs extérieurs à l’entreprise ? Au début de 1870, faisant le bilan de l’état de l’industrie minérale dans le département de l’Allier, Gouvenain, ingénieur du Corps des Mines, note, à propos des changements que la mine de Commentry connaît : « L’énergétique, intelligente et très pratique habilité avec laquelle est dirigée cette mine donne toute garantie pour l’exécution magistrale de cette grande œuvre ». S’il n’est pas nommé, le propos concerne Fayol qui, depuis son recrutement, a fait montre de qualités de commandement, de meneur d’hommes, remarquables. Dans cette houillère, il n’est encore qu’au début d’une carrière prometteuse et pareille description pourrait correspondre à d’autres jeunes ingénieurs civils. Fayol a donc été capable de démontrer d’autres talents, justifiant ce colloque et cette conférence inaugurale. C’est notamment par la parution de l’Administration industrielle et générale en 1916 que Fayol est toujours connu. Cent ans après, l’ouvrage étonne encore par son actualité et son originalité. Somme sur le métier d’ingénieur, sur ses qualités et ses atouts, mais aussi œuvre sociale, la publication constitue un testament intellectuel et pratique longuement mûri. Ce legs n’est pas que l’œuvre de Fayol. Sa formation d’ingénieur civil des mines à l’École des Mines de Saint-Étienne a exercé une influence considérable sur sa carrière. Dès sa sortie de l’École, Fayol est recruté par la grande entreprise minière et sidérurgique Commentry-Fourchambault. Il y fait toute sa carrière pour en devenir directeur général en 1888, alors que l’entreprise est en grande difficulté, pour conserver cette fonction jusqu’à sa retraite en 1918. La démarche de Fayol ne s’est pas limitée au monde de l’entreprise. Il a souhaité porter son influence au sein et au-delà des associations de techniciens et d’ingénieurs en soutenant des sociétés savantes et de grands projets de recherches scientifiques. La gestion des entreprises et sa théorisation, la science, la technique et la société sont autant de thèmes dans lesquels les travaux de ce « Grand patron » ont été marquants. En fait, le discours de Fayol n’est pas confiné à la gestion scientifique du travail, car il vise à toucher la société, tout en tirant profit des compétences acquises dans les domaines de la technique, de la science et de l’économie.